mercredi 23 octobre 2019

[Retour de concert] The Good The Bad and The Queen - 15 juillet 2019




Où l'on apprend qu'on fait de bonnes soupes dans les vieilles soupières à condition que les vieilles soupières soient bonnes.

Il y a des signes qui ne trompent pas. Tu as survécu à la canicule au prix de litres d'eau engloutis, d'une utilisation forcenée de la clim et, en conséquence, d'un élargissement flou mais certain du trou de la couche d'ozone, même si - entre nous - tu n'es pas très sûr de bien comprendre le sens profond de cette donnée climatique que tu régurgites en bon être humain conscient de la tâche ardue qui l'attend, lui et ses compères. Tu es passé au travers des orages de grêle, des orages de pluie, des pluies de grêle, des matches de tennis à coup de glaçons tombés du ciel, tellement fort qu'ils feraient passer les dix plaies d’Égypte pour la nouvelle attraction du monde merveilleux de Mickey. Tu as traversé avec plus ou moins de brio - mais suffisamment de satisfaction pour partir l'esprit apaisé - une journée de travail assez identique à beaucoup d'autres, c'est-à-dire suffisamment prise de tête pour avoir envie de débrancher le cerveau, ou plutôt le connecter pendant quelques heures sur un réseau alternatif propre à te doper à la dopamine à doses quasi létales pour pour pour..."Novocaïne for the soul...", ouais on connait la chanson.

Et donc en cette fin de journée presque cauchemardesque - mais ne te mens pas, tu les aimes ces journées, tu en redemandes - tu sors la tête de l'eau, tu ouvres la bouche et, dans un bruit d'aspirateur ou de conduit de ventilation ou d'un mélange des deux, tu remplis tes poumons d'un air qui sent déjà un peu la dopamine, la bière et les vibrations de la basse dans ta cage thoracique. A la fin de cette journée, tu te retournes - ok c'est une image hein, en réalité tu peux exécuter la suite sans te retourner réellement - et tu te dis que merde, tu l'as bien mérité. Il y a des signes qui ne trompent pas.

Après des mois d'enfer, des semaines endiablées, des journées démoniaques - Demon Days, j'assure dans l'art de la transition - tu aspires juste à un miracle. Ici l'histoire semble prendre une tournure un peu biblique mais c'est pour mieux appuyer le propos. Un miracle et rien d'autre. Un machin fou, énorme, délirant, une soirée de malades, un truc de dingue que t'avais jamais vécu, que tu pourras raconter à tes petits enfants - quand t'en auras - qui te regarderont comme un extra-terrestre en se demandant si papy n'aurait pas abusé de substances bizarres qui se consommaient au temps où il était jeune - le moyen-âge ou un truc approchant - mais qui comprendront en voyant ta tronche ahurie et ton air possédé - par le démon again - que tu as vécu un évènement proche de l'indescriptible, à la limite du c'est pas possible, aux confins du à peine croyable. Un miracle !

Paul Simonon qui danse avec sa basse dans les bras. Paul Simonon qui a appris à jouer de la basse. Pauuuuuuuuuuuuuul Simooooooooooooooonon ! Je sais, j'en fais des tonnes, c'est le problème avec les miracles. Paul Simonon qui se marre sous sa casquette de Gavroche, Paul Simonon qui porte le costume de mon grand-père il y a 50 ans. Dopamine, bière et basse. What else ? Évidemment Damon (Démon ?) Albarn est le showman, il est fait pour ça. Bien sûr Simon Tong tricote à l'aise à la guitare, une corde à l'endroit, une corde à l'envers. Pas de doute, Tony Allen est un génie, c'est pas moi qui dirai le contraire, j'y connais rien en génie. Naturellement les cocos sont bien entourés, un percussionniste, un claviériste, deux violonistes, une violoncelliste, tous ces trucs en iste qui font vachement classe quand on est un groupe de rock aux ambitions musicales assumées.

N'empêche, malgré l'impressionnante liste de spécialistes en iste sur la piste, tu n'as d'yeux que pour Paul. Et si j'écris simplement Paul ce n'est pas pour économiser de précieux, bien que très hypothétiques, caractères sur twitter mais parce qu'on peut te proposer tous les Paulos du monde, des Weller et des Westerberg, des Macca et des Anka, Simon ou Personne, si on te dit Paul, y en a un et un seul. Et donc notre Paul de Brixton a bel et bien l'air de s'amuser avec sa basse. Semble à l'aise, se marre, avance, recule, esquisse un pas d'un côté, deux de l'autre côté. Déconne avec Albarn. Au rythme d'une set-list probablement préparée par le stagiaire de première année de MBA, comprenez Musiciens Branleurs Associés, tellement elle brille par son originalité : on vous joue l'intégralité du deuxième album dans l'ordre, intro comprise, et ensuite on vous balance le premier album mais attention, pour celui-là on a mélangé les titres parce qu'on est un peu des fous quand même.

Mais c'est pas grave, pendant ce temps Paul danse, et ce jeu de mot audacieux arrachera probablement un petit sourire de contentement au lecteur qui aurait pu sentir une pointe de sarcasme dans la fin du paragraphe précédent. Et puis sois honnête, le sarcasme et le cynisme ne sont ici qu'affaire de posture du narrateur qui se la raconte en racontant, parce que, entre nous, quelle que soit la set-list, il suffit de remarquer le battement trépident de ton pied sur la pierre multi-séculaire, qui en a vu défiler des blaireaux aux goûts douteux en 2000 ans d'existence, pour se convaincre que tu passes un bon moment dans un bon concert. Démon fanfaronne juste ce qu'il faut, Simon a tôt fait de te confectionner une petite laine spéciale fin de canicule et Tony et Paul s'entendent plutôt bien pour te désosser la cage thoracique à coups de basse et de fûts bien sentis, le tout élégamment emballé, reconnais-le, par la section à cordes comme on dit dans la salle de rédac des Inrocks.

Et c'est tout à ta joie, arborant le sourire un peu niais, mais communicatif, de celui qui a vu une apparition, la Sainte-Vierge en maillot de bain, un alien en short, le Père-Noël en tongue, que tu quittes le théâtre antique et ses coussins en toc, les pierres surchauffées et la bière réchauffée, fredonnant au hasard History Song ou The Great Fire, repartant vaillamment vers des lendemains caniculaires, le cœur rempli de cette allégresse qui t'inonde sitôt qu'un bon vieux shoot de dopamine t'a imbibé le cerveau.

Par honnêteté intellectuelle et déontologie journalistique, ici un nouveau sourire est de rigueur, je glisse un petit mot sur le groupe de première partie : Satellite Jockey. Sans faire injure à leur "pop mélodique aux arrangements subtils, fouillés mais cependant évidents", à leurs combinaisons d'entrainement de la NASA et à la gentillesse évidente de ces six musiciens tout mignon, tout ça m'a glissé dessus sans que je m'en rende compte. Il y a des signes qui ne trompent pas.


C'était le 15 juillet 2019 aux Nuits de Fourvière. J'y étais.




Deux vidéos - qui ne m'appartiennent pas - du concert pour illustrer. Quand je vous dis qu'il danse avec sa basse...
 

Set-List :

Introduction
Merrie Land
Gun to the Head
Nineteen Seventeen
The Great Fire
Lady Boston
The Truce of Twilight
Ribbons
The Last Man to Leave
The Poison Tree (with extended intro)
History Song
80's Life
Herculean
Nature Springs
Three Changes

Encore:
Kingdom of Doom
Green Fields
The Good, The Bad & The Queen


Si vous cherchez un mot de passe, essayez donc downgrade.


Merci aux visiteurs qui laissent une trace de leur passage.

Till

4 commentaires:

  1. Non mais en fait il danse parce que là il y arrive, si ça se trouve la danse il a toujours aimé ça sauf qu'avant ll pouvait pas.
    Parce que la dernière fois que je l'ai vu moi Simo (parce que Paulo c'est déjà pris et qu'à l'époque on disait Simo, prononcé Saïmo bien sûr, me dis pas que t'as oublié) hé ben sa basse il la portait à hauteur de genou, t'as déjà essayé de danser avec une basse à hauteur de genou ?
    Quant à la dernière fois que je l'ai loupé c'était y a pas bien longtemps, et je m'en mords encore les genoux, il était venu exposer ses peintures pas loin de la maison, genre 1 km, et moi comme un con je bossais ce soir-là, pendant que mes potes faisaient des selfies avec lui, sympa comme tout il paraît. Bref, on me la fera plus, depuis j'ai arrêté de bosser et je m'en porte pas plus mal.
    T'sais quoi ? Vu les vidéos et comme tu le racontes je crois bien que j'aurais réussi à supporter deux heures avec l'autre là qui fait trop le beau à pas porter de casquette, mais comme toi j'aurais plutôt regardé vers la droite, vers le danseur-étoile.

    Welcome back Bro !

    Et fais pas le con, pardon, fais le con, je compte sur toi moi ...

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  2. Et ouais la basse sur le genou, la posture punk, c'était le bon temps comme disent les vieux.
    Bin rater une expo de Simo à côté de chez toi, tu cherches les emmerdes là. Je me suis souviens d'une époque où le beau Paul bastonnait avec JJ Burnel qui était ceinture noire de karaté ou un truc poétique dans le genre.

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    1. L'expo je l'ai vue, j'ai juste raté le soir où lui passait l'inaugurer, une histoire de motos en plus.
      Ah merde tiens, rien que d'en reparler ...
      Burnel le poète avait à l'époque une Hurricane X75 qui m'a toujours fait rêver.

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  3. Je connais rien aux motos mais j'ai vu les toiles de Paulo. Toute la série motos, blousons, casques et cie est sympa. Par contre il a une période corridas qui ne m'éclate pas du tout. Donc en gros tu as raté le vernissage et pas trinquer avec Sumo. Too bad !

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